Organiser ses services autrement : l’initiative de l’école secondaire Vanier
Introduction
Dans un monde où les besoins des élèves évoluent constamment, il est essentiel que notre approche de l’éducation évolue également. Heureusement, de plus en plus d’enseignants et de gestionnaires scolaires réfléchissent autrement, repensant la manière dont le soutien peut être offert à tous les élèves. C’est le cas de l’équipe de l’école secondaire Vanier, qui tente de répondre aux besoins du plus grand nombre d’élèves par le biais du Carrefour pédagogique, qui va au-delà du simple concept d’un local de soutien scolaire. En effet, il se distingue comme un véritable milieu de vie pour les élèves de la première à la cinquième secondaire. Cette initiative, ancrée dans une approche collaborative, vise à répondre à divers besoins des élèves, favorisant ainsi leur réussite académique et leur épanouissement personnel, dans un environnement qui les soutient et les valorise. Merci à tous les intervenants pour leur accueil chaleureux.
Besoin de changement
Il y a deux ans, le comité EHDAA de l’école secondaire Vanier a constaté que, malgré la présence d’un nombre suffisant de ressources au sein de l’établissement, les élèves ne parvenaient pas à réussir comme prévu. Cette observation a conduit à la conclusion qu’un revirement de situation était nécessaire pour améliorer les résultats scolaires et le bien-être des élèves. Marie Claude Janelle, directrice, nous a mentionné que, face à ce constat, une grande restructuration des services aux élèves a été entreprise. Les tâches des enseignants ressources et des orthopédagogues ont été réorganisées de façon à ce que tous travaillent de manière collaborative dans un lieu commun : le Carrefour pédagogique. Cet espace valorise tous les profils d’apprentissage et permet aux jeunes de se concentrer pleinement sur leur réussite.
Fonctionnement du Carrefour pédagogique
Andréanne Routhier, enseignante en adaptation scolaire, souligne que le Carrefour pédagogique est un lieu accessible aux élèves durant les quatre périodes d’enseignement de chaque journée, ainsi que pendant la pause du dîner et après l’école. Il y a toujours une personne présente pour les soutenir dans leurs apprentissages. Les enseignants peuvent inscrire leurs élèves pour réviser des notions, recevoir de l’aide individuelle ou en sous-groupe, et les superviser dans leur travail. Les élèves peuvent y passer une période complète ou seulement de 15 à 30 minutes avant de retourner en classe. Parfois, le Carrefour se déplace en classe pour soutenir directement les apprentissages de l’ensemble du groupe.
Cette flexibilité permet de créer des liens forts entre les élèves et les enseignants. Les jeunes sont souvent plus sensibles aux explications en petits groupes ou de façon individuelle. En plus du soutien académique, le Carrefour offre un accompagnement aux nouveaux arrivants et arrivantes, les aide à s’organiser et propose également du prêt de matériel. Il est également prévu d’ajouter quelques casiers pour superviser les élèves qui rencontrent des difficultés d’organisation. Il y a ainsi un roulement constant d’élèves tout au long de la journée, tous avec des besoins différents.
L’une des forces du Carrefour pédagogique réside dans son approche collaborative. Les enseignants et les intervenants y travaillent main dans la main pour offrir un soutien personnalisé à chaque élève. Cette approche permet de créer un lien de confiance entre les élèves et les adultes, mais également un sentiment d’appartenance chez le personnel enseignant : tous sont unis pour la réussite des jeunes.
Un lieu bienveillant et inclusif
Les jeunes peuvent aussi trouver une écoute attentive et des conseils pour gérer les défis personnels et émotionnels rencontrés. Mathilde Hanny-Guillaumes, psychoéducatrice, explique que les liens créés entre les jeunes et les adultes signifiants contribuent à leur bien-être général et leur engagement dans l’entreprise de leur projet de réussite.
Le Carrefour pédagogique est également un lieu sûr où les élèves peuvent se sentir en confiance et obtenir du soutien. Ce sentiment de sécurité est crucial pour les élèves, en particulier pour les personnes qui se sentent vulnérables ou marginalisées. En offrant un espace pour être soi-même et sans jugement, le Carrefour agit comme un facteur de protection important. Ce sentiment d’appartenance est essentiel pour la motivation scolaire des élèves.
Conditions favorables et défis rencontrés
Pour que le Carrefour pédagogique fonctionne efficacement, plusieurs conditions favorables doivent être réunies. Pierre Baillard, orthopédagogue, met en lumière deux facteurs d’importance.
En se tenant à jour avec les meilleures pratiques éducatives et les nouvelles approches pédagogiques, le personnel scolaire peut offrir un soutien de qualité et répondre de manière adéquate aux besoins variés des élèves.
Utiliser des termes et des concepts uniformes permet à l’équipe-école et aux élèves de se comprendre facilement, facilitant ainsi la communication et la collaboration. Cette cohérence est essentielle pour créer un environnement d’apprentissage harmonieux et efficace.
La mise en place du Carrefour pédagogique n’a pas été sans défis. Pierre Baillard partage certains des obstacles rencontrés et les stratégies déployées pour les surmonter.
L’un des premiers défis a été de maintenir les élèves en classe tout en leur offrant le soutien nécessaire. Il était crucial de trouver un équilibre entre le temps passé au Carrefour et le temps en classe. Pour y parvenir, on a encouragé les enseignants à utiliser le Carrefour de manière flexible, permettant aux élèves d’y aller pour des périodes courtes et ciblées avant de retourner en classe. L’intention du Carrefour a également été bien annoncée, puisqu’il était primordial qu’il ne soit pas utilisé au même titre qu’un local de retrait, par exemple.
Un autre défi a été de ne pas se précipiter vers des interventions ciblées (rôle de l’orthopédagogue) sans d’abord épuiser les stratégies universelles en classe. Il était important de renforcer les mesures universelles avant de passer à des interventions plus spécifiques. Cela nécessitait une évaluation continue des besoins des élèves et une adaptation des approches pédagogiques en conséquence. Le Carrefour doit compléter, et non remplacer, l’enseignement en classe, souligne Pierre Baillard. Les enseignants et les orthopédagogues ont travaillé ensemble pour s’assurer que les stratégies mises en place au Carrefour sont également appliquées en classe, créant ainsi une continuité dans l’apprentissage des élèves.
Retombées positives
Depuis l’instauration du Carrefour pédagogique, Marie-Ève Bibeau, enseignante de français en secondaire 2, observe de nombreuses retombées positives chez ses élèves :
Motivation et engagement
Le Carrefour permet d’offrir aux élèves des choix concernant leur climat de travail, pouvant choisir de travailler dans un environnement qui leur convient mieux, et parfois en compagnie d’une autre personne avec qui le lien est bon.
Enseignement différencié
Grâce au Carrefour, l’enseignement différencié devient plus accessible et la composition des classes peut être ajustée. Il arrive que l’enseignant.e garde en classe plusieurs élèves ayant des défis, alors que les élèves plus forts peuvent aller au Carrefour faire un travail de manière autonome.
Coopération
Le Carrefour favorise la coopération entre les élèves. Le climat d’échanges plus propice encourage les élèves à travailler ensemble, à partager leurs idées et à s’entraider.
Depuis l’instauration du Carrefour, Anne-Sophie Daigle, directrice adjointe, relève deux changements importants dans l’école :
Diminution des retraits de classe
Les élèves sortent moins souvent de la classe pour des raisons disciplinaires ou autres, car le Carrefour agit en prévention et est un espace où il est possible de se recentrer et recevoir l’aide nécessaire.
Nouvelle vision de la pédagogie
Ces changements ont conduit à une nouvelle vision de la pédagogie parmi les enseignants. Leur collaboration, le soutien individualisé et l’accent mis sur les besoins académiques ont transformé la manière dont l’enseignement est perçu et pratiqué. Les enseignants voient désormais la pédagogie comme un effort collectif où chaque élève peut bénéficier d’un environnement d’apprentissage inclusif.
En somme, le Carrefour pédagogique a non seulement enrichi l’expérience scolaire des élèves, mais a également transformé la pratique enseignante, créant un écosystème éducatif plus harmonieux et efficace.
Pour aller plus loin
Un peu plus sur l'autrice
Détentrice d’un baccalauréat en adaptation scolaire et sociale, Marie-Philippe a travaillé en classes spécialisées ainsi qu’en orthopédagogie en milieux scolaires et privés. Présentement gestionnaire et créatrice de contenus à l’Institut des troubles d’apprentissage du Québec, elle satisfait sa curiosité professionnelle en collaborant avec des experts et pédagogues passionnés. Consultante pour l’entreprise ALEO VR, Marie-Philippe conçoit des jeux visant à rééduquer les troubles spécifiques en lecture grâce à la réalité virtuelle. Elle a également fondé l’entreprise ScolAide qui vise à outiller le plus grand nombre d’enseignants et d’élèves en difficulté par le biais de conférences, consultations, capsules vidéos et documentation en ligne. Passionnée de littérature jeunesse et récipiendaire du prix Étincelle de reconnaissance en lecture du MEES, elle a complété un microprogramme en didactique cognitive des difficultés d’apprentissage de la lecture-écriture à l’UQAM et collabore au blogue J’enseigne avec la littérature jeunesse.